L’Équipement d’un Tour:
Vient le moment, pour celui qui veut faire de la fabrication mécanique un loisir, de choisir un tour pour l’acheter. Il est impossible de se passer de cette machine tant il y a de pièces rondes à usiner comme par exemple les roues, arbres, pignons, poulies, manivelles, excentriques, volants…..
Cet acte est toujours financièrement important et mérite donc beaucoup de réflexions et de connaissances préalables pour éviter de faire un mauvais choix. Le but de cet article est de vous aider avant de sauter le pas. Lorsque l’on achète un tour c’est souvent pour toute la vie et il vaut mieux ne pas avoir de regrets par la suite.
Il faut d’abord décider si on le prend neuf ou d’occasion en fonction des fonds dont on dispose. Je vous conseille d’être très prudent pour l’achat d’un tour d’occasion, surtout si vous le prenez à un artisan ou à un industriel. La machine risque d’avoir beaucoup servi et, avec l’usure, d’avoir perdu ses qualités géométriques. Il faut alors être du métier pour remettre en état correct un pareil tour. De plus ces machines sont très lourdes, ce qui en soit est une bonne qualité, mais nécessitent en conséquence des frais de transport importants. Ensuite elles sont souvent alimentées en courant électrique triphasé 400 volts que le particulier n’a pas chez lui, en général. Enfin elles peuvent être d’une puissance exagérée par rapport aux travaux que nous avons besoin de faire.
Selon moi, il vaut mieux économiser encore un peu son argent et acheter une machine neuve. Je vous l’ai déjà dit, la patience est l’une des vertus principales du mécanicien amateur. Certains vous diront que toutes les machines actuelles sont fabriquées en Chine et, en conséquence, de mauvaise qualité. Et bien c’est faux. J’ai eu l’occasion d’acheter récemment un tour de cette provenance et l’ayant moi-même vérifié, je peux vous affirmer que sa qualité géométrique est tout à fait conforme aux normes européennes exigées.
Le modéliste doit savoir ce qu’il compte usiner avec sa future machine. S’il est décidé à ne jamais faire des locomotives en écartement 5 ou 7 pouces ¼, inutile d’acheter une machine importante. Il existe de nombreux petits tours à la portée des amateurs et de prix tout à fait raisonnables. Ils sont adaptés aux pièces de micromécanique. Attention cependant à leurs capacités maximum d’usinage qui peuvent être très limitées. Pour ceux qui rêvent d’usiner des petits moteurs et des machines à vapeur fixes, c’est le diamètre des volants que vous serez susceptibles d’usiner qui déterminera votre choix.
Dans le cas de ceux qui veulent réaliser des locomotives en 5 ou 7 pouces ¼, je conseille d’opter pour une capacité d’usinage de 250 mm en diamètre et en longueur de 500 mm. Le prix de ces machines est déjà important. Vous remarquez que pour illustrer tout cela, il a fallu que je photographie mon tour. Cela ne veut pas dire que c’est celui-là qu’il faut acheter. Il existe bien d’autres marques qui font aussi l’affaire.
Les caractéristiques principales d’un tour :
Les trois caractéristiques principales d’un tour sont donc sa hauteur de pointe, soit le rayon du plus grand diamètre théoriquement usinable, et sa distance entre pointes qui donne la plus grande longueur de pièce que peut accepter la machine. La troisième est la puissance disponible sur la broche. Pour bien comprendre la suite de mes explications, j’ai indiqué sur la photographie ci-dessus le nom des différents organes. Les fabricants de machines donnent souvent la puissance totale consommée électriquement. Si vous choisissez un tour avec variateur électronique, il faut savoir que celui-ci absorbe pour son fonctionnement propre entre 200 et 300W. Cela fait autant moins de puissance sur la broche. A tout cela il faut ajouter, quel que soit le type de boite de vitesse, le rendement de la transmission qui est généralement entre 0,7 et 0,8. Si vous désirez usiner souvent des pièces de grand diamètre avec des outils en carbure et avec un tour équipé d’un variateur, une puissance de plus d’1 kW est absolument nécessaire. Si pour les mêmes pièces de grand diamètre vous usinez avec des outils en acier rapide, que votre tour est équipé d’une boite de vitesse classique et comportant de faibles fréquences de rotation, vous pouvez choisir une puissance légèrement inférieure à 1 kW.
Une boite de vitesse classique est une boite à transmission par courroies montées sur des poulies étagées en diamètres. Bien sûr plus la puissance est grande, plus l’usinage est facile, mais le prix va aussi avec. Nous n’avons pas besoin de tomber dans le domaine professionnel. Pour nous le choix de la puissance est donc un compromis qu’il n’est pas toujours facile de résoudre.
Les différents organes d’un tour : (cliquer sur les images pour les visionner en plein écran)
Le mandrin à trois mors concentriques :
Il est positionné sur la broche à l’aide d’un centrage et est fixé par trois goujons et écrous. Il est généralement en fonte, ce qui est suffisant pour notre usage, et est toujours livré avec le tour. Le mandrin permet de maintenir des pièces, au maximum, égales à son diamètre. Il est livré avec trois mors durs à serrage extérieur ainsi que trois mors durs à serrage intérieur.
La clé du mandrin (qu’il faut jamais laisser dans le mandrin!) fait tourner un plateau intérieur munie d’une rainure en spirale. Les mors sont ainsi toujours à la même distance de l’axe de rotation. Les mors sont numérotés pour les monter dans l’ordre nécessaire dans les rainures du mandrin.
Sur l’image à droite la pièce est montée entre pointes mais la contre-pointe fixe a été remplacée par une pointe tournante. Cet accessoire, non obligatoire mais pratique, doit être acheté à part.
Sur la pièce à usiner est monté un toc, non fourni mais achetable séparément, qui entraîne la pièce en rotation. Sur la broche est monté un plateau pousse toc à acheter aussi, mais on peut se le fabriquer. Remarquez le tube fendu pour ne pas abimer la surface de la pièce.
Les pointes :
à l’entrée de l’alésage de la broche se trouve un cône creux appelé cône Morse qui permet à la fois de centrer et coincer une pointe. Une seconde pointe opposée à la première et appelée contre-pointe, est montée de la même façon dans la poupée mobile située à droite du tour.
En général le cône Morse de la contre-pointe est plus petit que celui de la broche. Les dimensions de ces cônes sont normalisées. On utilise des numéros pour les distinguer : CM1 – CM2 – CM3 – CM4.
Pour décoincer la pointe de la broche il faut prévoir une tige suffisamment longue que l’on introduit par le côté gauche de l’alésage de la broche (coté boite des avances). En frappant légèrement la tige on parvient à décoincer et extraire la pointe. Pour démonter celle de la contre-pointe il suffit de tourner le volant pour faire rentrer le fourreau, ce qui finit par extraire la contre-pointe. Ces deux pointes sont toujours fournies avec le tour. Elles permettent d’usiner les pièces longues comme des arbres, des essieux, des axes, à condition d’avoir préalablement percé des trous de centre aux extrémités. Ces trous sont réalisés avec des forets spéciaux appelés forets à centrer.
La poupée mobile :
Sa fonction ne se limite pas à soutenir les pièces longues. Elle peut coulisser le long du banc et être fixée à n’importe quel endroit de celui-ci, soit par un boulon qui nécessite une clé, soit par un levier intégré qui commande un excentrique, système plus pratique. Les déplacements répétés de la poupée mobile risquant de provoquer une usure des glissières du banc, il est bon qu’elle possède sa propre glissière de guidage. En montant à la place de la contre-pointe un mandrin de perçage à cône Morse équipé d’un foret, la poupée mobile permet de percer en bout les pièces montées en l’air dans le mandrin de broche. L’expression montage en l’air signifie que la pièce est maintenue dans le mandrin de broche sans autre moyen.
Un tour qui se respecte doit avoir un réglage transversal de la position de la poupée mobile. Cela permet d’usiner les pièces longues de manière bien cylindrique et aussi d’obtenir des cônes de faible inclinaison par désaxement de la poupée.
Dans ce cas la longueur de la pièce ne doit pas être supérieure à deux fois son diamètre. Si elle est supérieure à cette valeur, l’extrémité de la pièce doit être reprise par la contre-pointe. C’est alors un montage mixte absolument nécessaire pour ne pas voir sa pièce expulsée du mandrin sous l’effort de coupe. Le perçage en bout de la pièce s’effectue, après avoir mis en rotation la broche, en faisant tourner manuellement le volant de la poupée mobile. Un système vis-écrou transforme le mouvement de rotation du volant en un mouvement de translation du fourreau et donc du foret.
Les chariots :
Ce sont les organes qui portent les outils et qui se déplacent, l’un, parallèlement au banc est appelé chariot longitudinal ou trainard, l’autre, perpendiculairement au banc se nomme chariot transversal. Surmontant le tout se trouve le chariot porte-outil qui peut s’orienter à 360° par rapport à un axe vertical. Les jeux de ces différents chariots peuvent être réglés par des lardons en agissant sur des vis.
Sur le type de tour qui nous intéresse, en général seul le chariot longitudinal peut être commandé automatiquement. Pour cela on abaisse un levier d’embrayage sur la vis mère, ce qui provoque son déplacement. En orientant en biais le chariot porte-outil on peut usiner des cônes dont la longueur ne peut pas dépasser la course de ce chariot.
La tourelle porte-outil :
sa fonction est de maintenir rigidement les outils de coupe. Les fabricants livrent souvent une tourelle carrée que l’on peut faire tourner et qui peut être positionnée avec précision tous les 90° par un doigt à ressort situé dans le chariot porte-outil. Sur la photo à gauche elle est démontée du tour. En théorie on peut placer jusqu’à quatre outils simultanément sur ce type de tourelle, mais si les outils sont trop longs c’est pratiquement deux.
Pour un bon usinage l’arête de coupe de l’outil doit être positionnée minutieusement à hauteur des pointes. Il faut avoir un jeu de cales de différentes épaisseurs pour faire ce réglage de hauteur. Si votre budget le permet prenez en plus une tourelle avec porte-outil à réglage vertical par vis, cela vous fera gagner du temps, mais ce n’est pas obligatoire.
La boite des vitesses et des avances :
Elle se trouve sur la partie gauche de la poupée fixe cachée par un carter amovible. On y trouve la transmission entre le moteur et la broche ainsi que celle entre la broche et la vis mère qui constitue la boite des avances. La transmission moteur vers broche est faite par courroie et poulies étagées tandis que la transmission broche vers vis mère est toujours faite par un jeu d’engrenages amovibles.
La gamme des vitesses, on devrait dire des fréquences de rotation, est variable d’un tour à l’autre. Un intervalle de 40 à 3000 tours par minute est l’idéal pour le modéliste qui utilise à la fois les outils en acier rapide et ceux en carbure mais souvent une telle plage est réservée aux tours professionnels. Les machines à notre portée ont toujours un intervalle plus réduit avec des fréquences de rotation assez élevées.
On appelle avance par tour la quantité dont l’outil avance en mm, pour un tour de la broche. Le tour doit permettre d’avoir au moins deux avances par tour, par exemple de 0,1 et 0,2 mm/tr. On l’obtient par changement des engrenages visibles sur la photo, en faisant varier les nombres de dents. C’est le même mode opératoire pour obtenir des filetages avec des pas différents.
En général les fabricants livrent avec le tour l’ensemble des engrenages nécessaires, permettant de faire à la fois des pas métriques et des pas basés sur le pouce anglais. Le pignon visible à gauche de la photo peut être intercalé entre la broche et la boite des avances pour obtenir des filetages au pas à gauche. Ce sont des filetages de sens contraire au sens habituel de ceux des vis, qui sont, eux, des pas à droite.
Les dispositifs de lubrification :
De nombreux graisseurs doivent être prévus. C’est important et doit être vérifié avant de se décider à acheter tout type de machine.
La meilleure façon de perdre rapidement les qualités géométriques de son tour est de ne jamais le lubrifier. Il est indispensable de se procurer une burette avec un embout capable de s’appliquer sur chaque graisseur.
Les accessoires complémentaires :
Ces accessoires font partie de l’équipement d’un tour mais ne sont pas indispensable au début. Cependant ils facilitent beaucoup l’usinage dans certains cas de pièces. Ils peuvent être achetés plus tard, quand on en a besoin.
Le mandrin porte-pinces :
une pièce de tournage se fabrique schématiquement en deux opérations au moins. Par exemple dans le cas du montage en l’air on usine d’abord un côté de la pièce, puis on la démonte du mandrin de broche à trois mors concentriques, on la retourne et on la remonte dans le mandrin pour terminer l’autre côté. Le fait de démonter la pièce provoque obligatoirement une erreur de coaxialité entre les surfaces de révolution qui ont été usinées de part et d’autre. Avec un mandrin un peu usé on peut trouver, en utilisant un comparateur (appareil de métrologie), une erreur de 0,04 à 0,1 mm, par exemple. Pour certaines pièces ce décalage est trop important et compromet leur fonctionnalité dans le mécanisme où elles sont prévues.
Pour éviter cela et si la pièce n’est pas de trop grand diamètre, on peut utiliser un mandrin muni d’une queue à cône Morse, pouvant recevoir des pinces fendues normalisées. On peut utiliser un jeu de pinces de la série ER 32, par exemple, qui permet de positionner et maintenir avec une précision de moins de 0,01 mm, des pièces de diamètres allant de 3 mm à 20 mm. Avec ce système on peut démonter et remonter plusieurs fois sans perte de précision.
La queue du mandrin est montée dans le cône Morse de la broche et est maintenue par une tige filetée introduite du côté de la boite des vitesses. Les inconvénients de ce procédé sont qu’il faut un jeu de plusieurs pinces car chaque pince ne peut serrer qu’une différence de diamètre de 1 mm, et que les pièces ne peuvent pas être longues.
Le plateau porte-pinces :
si l’on souhaite pouvoir usiner des pièces plus longues on peut, en gardant le même jeu de pinces, acheter à la place du mandrin, un plateau qui se monte directement sur la broche. La précision est la même, mais la pièce peut se loger beaucoup plus à l’intérieur de la broche.
Les mors doux :
le mandrin de broche à trois mors concentriques est toujours équipé de mors extérieurs et intérieurs durs. Le mot dur, en langage de mécanicien signifie que ces mors ont reçus un, traitement thermique pour augmenter leur dureté. Ces mors doivent serrer de nombreuses fois des barres qui sont brutes et c’est le seul moyen pour limiter leur usure et donc la perte de précision.
Pour éviter une mauvaise coaxialité des pièces plus grandes que celles qui sont serrables en pince, on peut se munir de mors doux que l’on monte à la place des mors durs dans le mandrin. La pièce à maintenir doit d’abord avoir une portée cylindrique usinée en mors durs. Le tourneur usine alors sur les mors doux un alésage du diamètre de la portée, qui permettra de reprendre la pièce dans le mandrin avec la même précision qu’une pince.
Le mandrin à quatre morts indépendants :
Il s’agit d’un mandrin de broche dont les quatre mors sont réglables séparément.
Il permet de maintenir des pièces de forme non cylindrique, irrégulière, prismatique comme, par exemple, des blocs moteurs, des excentriques, etc. Il existe aussi des mandrins à quatre mors concentriques pour usiner les pièces carrées. Je vous déconseille d’en acheter un. Nous pouvons faire cela avec un mandrin à trois mors concentriques ou un mandrin à quatre mors indépendants.
La lunette fixe :
Cet accessoire que l’on fixe sur le banc du tour permet de guider les pièces très longues à leur extrémité pour usiner un trou de centre ou pour dresser leur face en bout. Pour cela le tourneur agit sur trois touches de frottement lubrifiées qui guident la pièce durant son usinage.
La lunette à suivre :
elle est aussi utilisée pour les pièces très longues et risquant de fléchir sous l’effort de coupe de l’outil. Elle est fixée sur le chariot longitudinal, en face de l’outil et ne possède que deux touches réglables lubrifiées qui prennent appui sur la pièce pendant son usinage.